Pages avec des trucs

vendredi 13 juillet 2007

Alice au Pays des Merveilles


Enfin, elle a osé. Elle est entrée dans une librairie. Elle est allée au rayon poche. Elle a cherché la lettre "c". Elle s'est emparée du livre. Elle est allée à la caisse. Elle a payé. Elle est rentrée chez elle. Elle l'a lu. Enfin !

Tout petit, la mère racontait une histoire à la smala de ses gosses pour les endormir.
Allongés dans leurs lits, Lorina, Dinah, Edith, Bill, Charles et elle pouvaient la voir assisse dans le chambranle de la porte. En ombre chinoise dans la lumière du couloir. Effrayante et rassurante ; masse intimidante et forme recourbée ; bloquant toute fuite et les emmenant dans de folles aventures.

Un jour, elle ouvrit "Alice aux Pays des Merveilles".
Le choc. La peur. Carole fit semblant de dormir pour qu'elle arrête. Elle s'effrayait de devoir courser le lapin, de rencontrer la dame de coeur, de se faire trancher la tête. Mais cette bouche sombre lisait, lisait, lisait...

Souvent le matin la surprenait sans se souvenir d'avoir entendu sa mère se taire ; toute étonnée d'avoir encore sa tête.

Et puis ce fut une autre histoire.

Depuis elle a refait le monde avec des buveurs de thé, regardé l'heure en râlant parce qu'elle était en retard, joué au strip-poker et même chassé le Snark.

Elle sourit d'avance au sourire de son fils Louis, ce soir, au moment du coucher.

jeudi 12 juillet 2007

De ma maison à mon école primaire

Un matin d'hiver de mes 12 ans, je parts avec mon p'tit frère Vincent à l'école. Le trajet n'est pas très long et nos parents n'ont pas encore peur de nous laisser nous promener seuls dans les bois.

Il a neigé. Des tonnes de blancs recouvrent la terre entière. Les branches des arbres n'en peuvent plus et la forêt brille dans la lumière de l'aube.


Nous escaladons la côte où, nous, les 4 frères avons appris à faire du vélo, une belle pente, bien casse-gueule.


Tout en haut, une maison qui aura toujours pour moi le goût du racisme bête et puant. La fille qui y habite m'a un jour crié "sale boche". Elle venait de voir cette stupide série télé sur "l'holocauste". Une vraie connasse qui ne sait pas faire la différence entre un nazi et un allemand ; un pitbull et un teckel ; du rhum Stroh et du redbull.


Après, la descente vers la voie de chemin de fer désaffectée (enfin, à ce moment, car maintenant, de temps en temps passe un train de marchandise).

Avec mon frère on a de la neige jusqu'aux genoux. On se pousse, on se lance des boules, on rigole, on tombe, on est mouillé. On a le visage brûlant de froid.

Après 15 minutes, on ressort sur la route déneigée. Ben oui, c'est la rue de la gendarmerie, alors faut qu'ils puissent aller vite vite chasser les voleurs. Avant, elle était dans la maison communale mais nos élus ne sont pas plus bêtes qu'à Las Vegas ou Charleroi.


Avant d'aller à l'école, on s'arrête chez Nénenne et Bon papa, la grand-mère a l'accent teutonique et le grand-père qui la ramena dans son sac en fuyant le stalag de Königsberg. (Non seulement il a vécu 5 ans sur le dos des nazis mais en plus il leur a piqué une femme, bien vu papy quant tu fais de la résistance).

Chez eux, on boit un cacao ou un lait. Mais toujours chaud. Puis on remet nos bottes froides et on court vers l'école via une des ruelles du village. Elle passe entre la scierie et des jardinets. (Mmmh, l'odeur du bois fraîchement coupé). Il y a des trous dans les murs et un jour, bien plus tard, avec un autre frère (je crois bien que c'était Christian, mais ça aurait pu être Yves), on a volé un paquet de clopes à un menuisier pour tester la fumette. C'était dégueu. Mais j'ai fumé de 16 à 36 ans. Je dois avoir les poumons comme le goudron de la cour de récré de cette petite école communale où on se sépare mon frère et moi. Et j'arrive dans la classe de 6ème de Mr Delferière.
- Allez, enfilez vos pantoufles et dépêchez-vous de rejoindre vos bancs. En silence !

La journée commence.